L'OAR 80 a été identifié en croisant plusieurs documents :
- L'inventaire des tapisseries d'Hermann Goering présente une photographie de la tapisserie OAR 80, avec l'annotation : "Ta 53a. Niederländisch - Manufacture de Brüges, Renaissance, Charles-Quint-Serie : Le sacre de Charles-Quint. 4,10 : 5,15m. M. Chesnier-Duchesne, Paris (Angerer), Febr. 1941" (1).
- La liste du dixième convoi en provenance de Munich à destination de Paris cite la tapisserie page 53 : " Run N° of 10th shipm. 1162 ; French Run. N° 6965 ; Munich Arr. N°. 6410 ; Berchtesgaden 1362 ; Author : Bruxelles ; Subject : Tapestry. The coronation of Charles V ; Presumed owner : Comtesse de Boshine (sic), Paris " (2).
La tapisserie "Le Sacre" a été acquise par Félix II Civet, avec les six autres pièces composant la tenture, en 1889 et 1890. Elle proviendrait d'une famille espagnole. Elle figure parmi les collections de la famille Civet au château de Saint-Maximin dans l'Oise, jusqu'en 1940 (3), date à laquelle la famille s'en sépare, entre mai et septembre. La famille la vend à un consortium de petits marchands dirigé par Henri Aumaitre pour la somme de 500 000 francs (4). Celui-ci tente en vain de vendre la tenture aux municipalités espagnoles qui souhaitaient l'offrir à Franco. Il organise alors, avec l'aide de la marchande d'art Gabrielle Chesnier-Duchesne, une exposition à Paris à la galerie Charpentier afin de présenter la tenture aux allemands.
Sur les conseils d'Andreas Hofer et Sepp Angerer, Hermann Goering en fait l'acquisition le 6 février 1941 pour la somme de 4 millions de francs (5), mais obtient un remboursement de 800 000 francs après avoir engagé des poursuites judiciaires en arguant d'un prix excessif (6). La tapisserie "Le Sacre" est transférée en Allemagne dans la collection Goering, peut-être à Carinhall, résidence du Reichsmarschall près de Berlin. Elle est ensuite inventoriée dans l'inventaire photographique de la collection Goering sous le numéro "Ta 53a" (7). Au moment de la débâcle allemande, Goering fait envoyer ses collections en train spécial à Neuhaus près de Nuremberg, les 23 février et 13 mars 1945, puis à Berchtesgaden le 13 avril 1945. C'est là que la septième US Army se saisit de l'ensemble de la collection (8). Un premier travail d'inventaire est effectué sur place ; l'oeuvre est numérotée : "Berchtesgaden : 1362".
A l'issue de la guerre, la tapisserie est envoyée au Central Collecting Point de Munich et enregistrée sous le numéro 6410. Elle est restituée par le Haut-Commissariat américain en Allemagne à l'Office des Biens et Intérêts Privés (OBIP), délégation du ministère français des Affaires étrangères pour les restitutions.
Elle revient en France par le dixième convoi en provenance de Munich, le 31 juillet 1946 sous le numéro 1162 (9). La tapisserie est alors mise à la disposition des Musées nationaux par l'OBIP (10).
Elle est retenue lors de la deuxième Commission de choix des œuvres de la récupération artistique du 17 novembre 1949 (11), prise en charge par la direction des musées de France, et confiée par celle-ci à la garde du musée du Louvre (département des Objets d'art) en 1951 (12).
La tapisserie est alors inscrite dans l'inventaire Objets d'Art Récupération (OAR), établi par Hubert Landais, sous le numéro OAR 80 (13).
La tapisserie est déposée au château de Compiègne le 9 juin 1950 -salle 9- (14), puis transférée au musée de Besançon le 23 août 1950 ; le dépôt est autorisé par l'arrêté du ministère de l’Éducation nationale du 31 août 1950 (15).