Ce calice a été offert au sanctuaire royal de Notre-Dame de Liesse par la duchesse de Berry, ainsi que l'indique l'inscription portée. Notre Dame de Liesse était en effet considérée comme l'avocate des couples princiers en mal d'enfant ; Mgr de Bombelles, aumônier de la duchesse, s'étant rendu à Liesse en 1819 et 1820, il pourrait s'agir d'un ex-voto propitiatoire pour la naissance d'un héritier de la couronne. L'offrande peut aussi avoir été faite en remerciement de la naissance, le 29 septembre 1820, d'Henri, duc de Bordeaux, l'enfant du miracle, à la suite de laquelle la duchesse de Berry fit un pèlerinage à Liesse le 23 mai 1821. Quoique la duchesse d'Angoulême et la duchesse de Berry aient honoré Edme Gelez (1784-?) de leurs commandes, la production de cet orfèvre est encore mal connue. Le calice est bien documenté par les poinçons et inscriptions portées. Le poinçon de grosse recense oriente vers une date de fabrication en 1819 mais la date portée indique 1820. Le prestige de la donatrice, les circonstances historiques et la rareté de l'orfèvre font tout l'intérêt de cette oeuvre dont la typologie et l'iconographie sont par ailleurs conventionnelles. Calice d'iconographie assez classique. Ce calice est auto-documenté par ses nombreuses inscriptions, dont celle : FAIT PAR GELEZ A PARIS 1820. Cette inscription est corroborée par le poinçon du maître, présent sur le pied, difficilement lisible, mais la forme du losange vertical et les lettres E. G., le Saint-Esprit et le ciboire sont bien reconnaissables. Edme Gelez est un orfèvre qui est à la fois méconnu et connu par les nombreuses inscriptions qui ornent sa production. Elles renseignent à la fois sur l'attribution et sur les circonstances de la commande et du don. Ce calice est d'une facture très comparable à celui conservé à Nantes, qui a fait l'objet d'une étude par M. Macé de Lépinay, publiée dans la revue du Louvre de 1986. Un calice comparable est conservé à la cathédrale Notre-Dame de Paris. Il porte la même inscription que le calice de Liesse. Seul le nom diffère : offert par la duchesse d'Angoulême. En effet, Edme Gelez était, semble-t-il, l'orfèvre attitré de toute la famille royale de l'époque de Charles X, et en particulier de sa fille, la duchesse de Berry et de sa belle-fille, la duchesse d'Angoulême. Liesse-Notre-Dame se situe à 15 km de Lens. Notre-Dame de Liesse est considérée comme l'une des patronnes de la dynastie Capétienne depuis la fin du Moyen Âge. La basilique a connu des pèlerinages royaux extrêmement fréquents. Elle est réputée pour son aide portée aux couples, et en particulier aux couples princiers en mal d'enfant. La duchesse de Berry ne s'est pas rendue elle-même à Liesse, mais y a envoyé son aumônier, monseigneur de Bombel, qui vint demander un héritier pour le duc et la duchesse de Berry. Lorsque l'heureuse nouvelle de la grossesse a été annoncée, l'aumônier est revenu, même si entre temps le duc de Berry a été assassiné, pour remercier de cette naissance quasi-miraculeuse du duc de Bordeaux. Ou bien la duchesse s'est rendue en 1821 à Liesse avec cet ex-voto, qu'elle a fait graver, ou elle l'a fait envoyer par son aumônier, ou bien encore il a été offert pendant sa grossesse. Une offrande à l'occasion de la naissance du duc de Bordeaux, qu'elle soit annoncée ou qu'elle soit déjà réalisée, une oeuvre bien documentée, un orfèvre rare, une provenance prestigieuse et des circonstances historiques qui lui paraissent intéressantes, certes au niveau local, mais qui recoupent l'Histoire de France.