Médiathèque Jacques Chirac

Dénomination de l'édifice

Architecture de culture recherche sport ou loisir ; édifice et aménagement de culture recherche sport ou loisir ; bibliothèque

Titre courant

Médiathèque Jacques Chirac

Localisation

Grand Est ; Aube (10) ; Troyes ; 7-9 rue des Filles-Dieu

Adresse de l'édifice

Filles-Dieu (rue des) 7-9

Références cadastrales

000 BS746 ; 748 à 751

Siècle de la campagne principale de construction

21e siècle

Siècle de campagne secondaire de consctruction

21e siècle

Année(s) de(s) campagne(s) de construction

1999 ; 2002

Auteur de l'édifice

Description historique

La construction de la bibliothèque municipale de Troyes en 1992 s’inscrit dans le cadre du programme instauré par la loi du 12 juillet 1992 encourageant la création, avec la participation financière de l’État à hauteur de 40 %, de douze bibliothèques municipales à vocation régionale (BMVR) dans plusieurs villes de province. Parmi les critères d’éligibilité au label BMVR figurent la possibilité de l’implantation de l’équipement potentiel sur une surface minimale de 50 mètres carrés par tranche de 1000 habitants dans une commune ou groupement de communes en comptant au moins 100 000, ainsi que la possession d’un fonds comptant 250 000 ouvrages pour adultes et de moyens de communication appropriés. En 2000, année du premier bilan réalisé sur l’opération et tandis que le chantier de la bibliothèque troyenne est en cours, cinq d’entre elles sont ouvertes à Orléans, Limoges (labellisées Patrimoine du XXe siècle), Montpellier, Poitiers et La Rochelle. En Champagne-Ardenne, les bibliothèques Georges-Pompidou de Châlons-en-Champagne et Jean-Falala de Reims seront inaugurées en 2003. Ailleurs en France, les villes de Marseille (2004), Nice (2002) et Toulouse (2004) sont les autres bénéficiaires de ce programme, avec Rennes dont la bibliothèque des Champs-Libres de Christian de Portzamparc est la dernière à ouvrir ses portes (2006). L’écart de dates entre l’inauguration des premières bibliothèques dans les années 1990 et les travaux menés jusqu’en 2006 s’explique notamment par la totale autonomie des maîtrises d’ouvrage, chargées de mettre à disposition surfaces foncières et de trouver la part restante des financements nécessaires. A Troyes, la bibliothèque municipale trouve sa place près du centre-ville. Elle est desservie notamment par le boulevard Gambetta – qui forme la ligne est-ouest du « bouchon de champagne » – le long duquel l’acquisition supplémentaire de deux parcelles par la communauté de l’agglomération troyenne en 2000 permet la création d’un passage donnant accès à l’esplanade de l’édifice, dont l’aménagement est soumis à un concours en mai 2001. La bibliothèque occupe un terrain situé dans un tissu urbain relativement contraint, à proximité du conservatoire, de l’école primaire Diderot et, plus à l’est, du théâtre de Champagne, à l’emplacement d’un ancien bâtiment industriel en brique. Le nouvel équipement culturel s’adosse à l’ancien lycée Second Empire voisin à l’ouest dont l’aile Est, en mauvais état, est détruite à l’exception de la façade donnant sur la cour – conservée et intégrée au projet. L’alternative de la destruction ou de l’utilisation de cette aile, laissée à l’appréciation de la maîtrise d’œuvre, relève du choix des architectes Pierre du Besset et Dominique Lyon, attributaires du projet à la suite du concours organisé en juin 1997. Les travaux durent trois ans, de juin 1999 au même mois de l’année 2002. L’inauguration de la nouvelle bibliothèque municipale eut lieu le 14 octobre 2002, en présence du président de la République et du député-maire François Baroin. Le bâtiment est primé cette année-là à l’Équerre d’argent, qui consacre la création d’un équipement culturel urbain dont le rayonnement dépasse le cadre de la métropole, et qui non seulement accueille les habitants de la communauté d’agglomération, mais offre un écrin à la collection de près de 2000 manuscrits provenant du fonds de la bibliothèque de l’abbaye cistercienne de Clairvaux, qui sera inscrit en 2009 au registre Mémoire du Monde de l’UNESCO. Devenue médiathèque de Troyes Champagne métropole, la bibliothèque à vocation régionale reçoit le 21 décembre 2017, par décision du conseil communautaire, le nouveau nom de médiathèque Jacques Chirac.

Commentaire descriptif de l'édifice

Élevé en cœur d’îlot et accessible par la rue des Filles-Dieu au nord, l’allée Raymond-Moretti à l’est et le boulevard Gambetta au sud, via un passage pratiqué entre le restaurant McDonald’s et la longue partie frontale de l’ancien lycée, la médiathèque n’a pas « pignon sur rue ». La large façade vitrée du vaste édifice parallélépipédique orienté nord-sud, se donne néanmoins à voir, depuis la place Jean-Moulin située à l’extrémité nord de l’avenue de la République. Conçue sur deux hauts niveaux – rez-de-chaussée et étage – selon un plan simple (légèrement trapézoïdal si l’on considère la légère oblique formée par la façade arrière – correspondant à l’un des deux petits côtés du quadrilatère), son entrée est précédée par un vaste parvis aménagé simplement, pavé, entouré de bancs en pierre et précédé de marches aux endroits présentant des différences de niveaux avec la voirie adjacente. La simplicité du plan masse de la médiathèque trouve des contrepoints subtils dans les ondulations et jeux de transparence que permettent les voiles de verre et de métal formant son infrastructure. Conçue sur une structure simple de poteaux-poutres métalliques et dalles de béton, la bibliothèque est entièrement habillée de verre à l’extérieur, où des bandes de sur-façade en verre teinté bleu (film sérigraphié) tapissent tout la longueur de l’élévation longitudinale est, assurant un effet de relief et renforçant les variations lumineuses opérées par ce matériau. La façade postérieure (où sont lisibles les deux niveaux intérieurs de l’ensemble, ménagés dans cette partie grâce au dénivelé), incurvée, est habillée sur les deux niveaux principaux d’une série de tubes jaunes orangé ; le motif ainsi dessiné semble avoir inspiré aux architectes de l’immeuble d’en face sis au n°10 de la rue des Filles-Dieu (livré en 2012 par l’agence Tequi-Pointeau), les superstructures courbes à tasseaux de bois. De part et d’autre de la façade principale, la sur-façade bleue se prolonge en avant de la surface vitrée – dont les lignes structurelles de prime abord strictement orthogonales, révèlent en fait la « cassure » progressive en hauteur des panneaux de maintien, créant une subtile concavité : les deux voiles latéraux matérialisent un espace couvert assurant l’impression d’accueil vers l’intérieur où le sas circulaire, saillant à l’extérieur en demi-lune et également vitré, sert de point d’attraction vers l’entrée effective. A l’exception de rares éléments tels que les cages d’ascenseur ou certaines cages d’escalier et autres parois secondaires, les cloisons intérieures sont intégralement vitrées pour assurer et affirmer la permanence des échanges qui s’opèrent dans ces lieux où la fluidité est le maître-mot de l’organisation des différents pôles.

Intérêt de l'édifice

Lorsqu’ils conçoivent la bibliothèque de Troyes en 1997-1999, Pierre du Besset et Dominique Lyon ont déjà à leur actif – ou gèrent concomitamment – la construction de plusieurs bibliothèques ou médiathèques. Moins transparente mais d’une grande audace formelle, celle d’Orléans (1994) se distingue par ses effets texturés et présente déjà des espaces intérieurs organisés en large plateaux successifs, reliés entre eux et avec l’extérieur par des jeux d’ouverture. A mi-chemin entre de nombreux projets et réalisations portés par le duo d’architectes au cours des années 1990-2000, la bibliothèque de Troyes s’affirme avec une audace particulière dans le paysage troyen : avec sa carapace qui tente de se faire oublier et s’affirme pourtant avec force dans le paysage urbain, la médiathèque Jacques-Chirac se place en rupture avec les édifices plus anciens, plus denses et plus traditionnels qui l’environnent. Les équipements liés à la lecture et à la recherche et consultation de documents offrent généralement aux architectes l’opportunité de développer des écritures libres, pour rendre particulièrement lisible que leur destination particulière et que celle-ci détonne par rapport à d’autres projets architecturaux et urbains caractérisés par leur fonction plus strictement utilitaire. Réalisée concomitamment à celle de Troyes, la médiathèque de Sendaï au Japon (Toyo Ito et associés, livrée en janvier 2001), toute de verre vêtue, entre en résonnance par sa structure aérienne avec la création auboise des architectes parisiens, d’autant plus audacieuse qu’elle doit trouver sa place dans un contexte de réalisations plongeant des racines profondes dans l’histoire de la ville. Le mouvement de ses façades symbolise des dynamiques urbaines qui à la fois justifient sa réalisation et en dépassent le strict cadre, dans le jeu de monumentalité et de fondu réalisé avec ses matériaux fluides et colorés. Réalisation moderne déployée dans un tissu urbain historique, la bibliothèque a pour particularité de servir d’écrin à une collection patrimoniale d’ampleur : le fonds de manuscrits de la bibliothèque de Clairvaux. La mise en abyme opérée par Pierre du Besset et Dominique Lyon apparaît a posteriori comme le parti-pris le plus approprié de mise en scène pour une entité formant le cœur de l’œuvre architecturale qui l’enveloppe. Assortie d’une mise en œuvre faisant jouer les aspects d’opacité et d’enveloppe, cette logique d’emboîtement est poussée à son maximum et néanmoins, avec sobriété, traduisant la double volonté de conserver et de donner à voir ce trésor. Pour révéler non seulement le fonds patrimonial mais l’ensemble des fonctions de la bibliothèque, le système constructif conçu sur le principe de l’enveloppe de verre transparente et le voile métallique ondulé et irradiant délivre ses nombreuses qualités : fluidité, ouverture, luminosité et diffusion d’une lumière d’ambiance. Mais outre les fonctions de l’édifice liées d’une part à la conservation et l’exposition d’un patrimoine et d’autre part, à la lecture et à l’étude, le parti-pris architectural adopté par les maîtres d’œuvre propose une vision symbolique de l’usage de matériaux, allant au-delà de ces aspects fonctionnels : en permettant à l’air, à la lumière et au vide d’exprimer le caractère culturel et social inhérent à ces lieux en dialogue avec ses éléments matériels, les propositions structurelles et architectoniques déployées autour du métal et du verre constituent l’âme de l’édifice.

Date de label

2023

Statut juridique du propriétaire

Public

Date de l'enquête ou du dernier récolement

2023

Cadre de l'étude